Cher Pierre Glace,
je sais que votre missive ne m'était pas adressée, et que je sors, comme Thierry d'un silence annoncé, mais permettez-moi de partager mon point de vue. Il faut dire que vous lire, sur ce thème ou sur celui du gallinacé daltonien, est si agréable, que cela donne envie d'échanger. Votre forme est savoureuse, et votre fond habité, et a priori, habité pacifiquement.
Le fond, sur le sujet de la biodynamie, n’est selon moi qu’une affaire de croyance
Il n'est "que croyances" semble reléguer la thématique à un lot d'affabulations superstitieuses vaguement ésotériques. Votre formulation, pour être juste, implique un présupposé essentiel, tu ici : le sujet de la BioD n'est que croyance, pour celui qui parle. C'est ce que votre "selon moi" stipule. Or, pour n'être "que croyances", au point de ne pouvoir jamais "aller beaucoup plus loin", il faut que le référent appliqué le confine à cet état. Le référent scientifique, s'il n'est pas nommé, est clairement imposé comme seul déterminant acceptable pour vous. Vos références à la mémoire de l'eau et aux piscines avinées (excellente image, by the way) soulignent ce point de vue.
Pourtant, penser que seul le cadre scientifique est acceptable pour considérer, comprendre et évaluer une chose est également une croyance, et non des moindres! Et imposer à qui que ce soit, qui parle de son expérience vécue, la fourche caudine de la seule approche scientifique est une posture dogmatique. Et une posture qui ne tient pas la route. Pouvez-vous démontrer l'existence ou l'utilité de la philosophie, scientifiquement? Vous parlez des humanités, qui manquent à la médecine, et je partage votre point de vue. Mais d'ou vous vient cette conclusion? Du bon sens, de l'expérience vécue. Du terrain et de la relation d'aide, ce fil changeant et embrouillé que le thérapeute se doit absolument de suivre, s'il veut comprendre l'autre et le toucher. Traiter un organe appartient sans nul doute à la science, mais soigner une personne, envisager la guérison (ou la mort) outrepasse infiniment le cadre scientifique. Qui songerait à railler cela ou à ironiser? Ou à exiger une preuve? Et comment en parler autrement que par la parabole, ou en citant d'autres penseurs, des personnes plus sages ou juste éclairantes, ayant vécu cette expérience?
Vous voyez depuis longtemps ou je veux en venir, avec mes gros sabots cloutés de fil blanc, cher Pierre. Je ne vous assènerai pas ma conclusion. Mais je ne crois pas qu'à parler de croyances, de vécus, d'expérience terrain liées à des pratiques et qu'à citer d'autres qui pensèrent avant nous, on perturbe un forum, un sujet, qui tente tant bien que mal d'aborder un thème pour le moins décalé et ardu. Ce n'est pas le cas en lui imposant une limite scientifique au delà de laquelle il ne "saurait aller".
Je vais maintenant un peu parler de moi (je sais que ça fait plaisir à Luc) et du sujet. Je ne crois pas en la BioD. Je ne la connais pas assez, ni pour "y croire" ni pour la fusiller, ou la réduire à quelques facteurs rationnels qui me rassureraient (attention à la vigne, soin accru du vigneron...). Faut dire qu'elle ne m'inquiète pas, pourquoi donc me rassurerais-je sur son dos? En revanche, elle ressemble à d'autres choses, auxquelles je crois. Des choses hors du champ technique ou scientifique, certaines choses vécues, d'autres choses disons, spirituelles ou métaphysiques. Bref, oui, un fatras de pures croyances ne pouvant être plus que cela... aux yeux de la science pure. Pourtant c'est aussi mon vécu, mon expérience, et la BioD fait certains échos avec cette petite "clinique personnelle". Des échos instinctifs, partiaux, tâtonnants. J'aime bien tâtonner. Là, je tâtonne en public, mais souvent, je tâtonne dans mon coin. Et Thierry me donnait matière à tâtonner. Et (c'est sémantiquement et scientifiquement inattaquable) je crois que ceux qui ont un problème avec ça sont bien ceux qui ont le problème.